Création d’une zone à faibles émissions mobilités (ZFE-M) – mise à disposition du public du projet d’arrêté 2024
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Allons… faites un effort… écoutez nos dirigeants, comme la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen, qui a défendu en ces termes la loi sur les matières premières, adoptée tout récemment pour accélérer la production minière et métallurgique en Europe : « Cette loi nous rapproche de nos ambitions climatiques. » Cela vous surprend ? Vous n’aviez pas compris que la manière la plus efficace de lutter contre le réchauffement climatique est d’ouvrir des mines ?\n\nIl faut dire que l’idée aurait semblé complètement loufoque il y a encore dix ans. L’extraction minière est l’un des principaux agents du réchauffement climatique (8 % des émissions) et de la déforestation. C’est la première productrice de déchets au monde. Elle est à l’origine d’une contamination des milieux qui menace la santé de 23 millions de personnes dans le monde — bref, c’est l’industrie la plus polluante que l’on connaisse. Pourtant, depuis quelques années, la Banque mondiale le martèle : « L’extraction de ressources minérales est un complément et non un obstacle à la construction d’un avenir plus vert et plus durable. »\n\nCette dernière citation est extraite d’un rapport de la Banque mondiale de 2017. Il a été rédigé en partenariat avec l’International Council on Mining and Metals, un regroupement des principales entreprises minières occidentales : BHP, Rio Tinto, Anglo American, Vale, Orano… C’est précisément de ce rapport que date l’idée que les mines sont indispensables pour sauver la planète.\n\nMiner des métaux pour maintenir un mode de vie\nLe raisonnement est le suivant : pour fabriquer des batteries électriques, des éoliennes, du photovoltaïque, il faut du lithium, du cobalt, du cuivre, etc. Et comme les dirigeants politiques et les entreprises n’entendent pas limiter le niveau de vie des plus riches et remettre à plat la production de béton, d’avions, de data centers, de fusées, de grosses voitures, de gadgets, etc, la seule manière d’essayer de limiter les émissions de CO2 consiste à produire des quantités immenses de métaux pour accompagner une demande en énergie tout aussi immense.\n\nPar exemple, pour électrifier uniquement les 39 millions de véhicules qui circulent en France, il faudrait plus d’un an de production mondiale de cobalt, et près de deux ans de production mondiale de lithium. L’industrie minière est ravie, la voilà propulsée en avant-garde de l’écologie. En 2021, la Banque mondiale, Rio Tinto et Anglo American ont peaufiné la démonstration grâce à un nouveau rapport et une campagne de communication intitulée « Climate-smart mining ». Même message : soutenir les entreprises minières est « la seule solution pour bâtir un avenir bas carbone ».\n\nMais alors, que sont devenues les émissions carbone du secteur minier, la déforestation, la pollution à grande échelle qui ont jusqu’ici fait de la mine le pire ennemi d’« un avenir plus vert et plus durable » ? Oui, il reste évidemment ce point de détail… Ce plan ne marche que si les mines n’émettent pas de CO2, si les mines ne déforestent pas, si les mines n’aggravent pas les effets du réchauffement climatique en polluant le peu d’eau disponible. Les entreprises minières répondent que c’est comme si c’était fait. Les États misent sur leur bonne foi. C’est à ce genre de pari qu’a été suspendue la possibilité de limiter le réchauffement climatique, le problème le plus grave auquel sont confrontés les habitants de cette planète.\n\nUn pari intenable\nInutile d’entretenir le suspense jusqu’en 2050 : le pari n’est pas tenable. La mine industrielle ne peut pas devenir l’amie du climat et de l’environnement. Ce n’est pas un problème de bonne volonté, c’est un problème systémique. Même si les entreprises étaient parfaitement intègres, pleinement engagées pour minimiser leurs dégâts, on ne peut pas exploiter des gisements contenant en moyenne 0,5 % de cuivre, 0,2 % d’uranium, 0,013 % d’argent sans détruire des milieux à grande échelle, consommer des quantités d’eau et d’énergie considérables. Aucune mine aujourd’hui ne parvient à se passer de combustibles fossiles. Aux stades de production ultérieurs, on ne sait pas non plus affiner des métaux sans charbon, gaz ou pétrole.\n\nPourtant, la mine et les métaux sont devenus le deus ex-machina de la décarbonation. Une industrie accusée depuis des décennies par les peuples autochtones de la planète de génocide et d’ethnocide se positionne aujourd’hui en leader climatique. Cette nouvelle fonction salvatrice justifie la mise en place de régimes d’exception destinés à accaparer des terres restées collectives, la violence des frontières extractives est décuplée : en Indonésie, en Inde, en Afrique centrale, en Amazonie, en Papouasie…\n\nEn Europe, la nouvelle loi sur les matières premières donne carte blanche aux entreprises minières sur le continent et dans les pays « partenaires », comme l’illustre une excellente étude de Corporate Europe Observatory et de l’Observatoire des multinationales. La transition est devenue le cache-sexe de la géostratégie des matières premières, auréolant des enjeux purement industriels, comme celui du titane dont a besoin Airbus pour produire ses avions.\n\nElle permet au lobby mondial des mines d’or, le World Gold Council, d’affirmer : « Nous avons besoin de minéraux pour décarboner l’économie, et l’or fait partie de cette solution. » L’or sert à produire des bijoux et des lingots destinés aux banques, avec quelques usages dans l’électronique. Avec une mauvaise foi remarquable, le World Gold Council soutient qu’« en tant que contributeur stratégique à l’économie des pays hôtes, le secteur de l’or peut jouer un rôle déterminant sur leur capacité à installer des énergies renouvelables ».\n\nSortir de cette cosmologie extractiviste\nMais plus profondément, en organisant dans les esprits ce partage artificiel entre les industries fossiles qui réchauffent le climat d’un côté, et les mines qui permettent la transition de l’autre, les institutions comme la Banque mondiale et la Commission européenne nous empêchent de comprendre à quel point la tragédie actuelle est le fruit du capitalisme en tant que rapport singulier au sous-sol, en tant que branchement direct de la société au règne minéral.\n\nLa catastrophe climatique et l’effondrement de la biodiversité sont le résultat de deux siècles d’une économie fondée sur l’extraction de métaux, de charbon, de pétrole. La mine est la matrice des valeurs et des pratiques occidentales qui nous ont portés au désastre actuel : celles d’une société qui n’a cessé d’utiliser le sous-sol pour construire une vie hors sol, une société qui a sacrifié l’habitat terrestre en mettant l’extraction au service de son rêve extra-terrestre. Rien ne pourra changer tant que demeurera intacte cette cosmologie extractiviste qui structure notre rapport au monde. C’est la raison pour laquelle le mouvement climat doit devenir anti-extractiviste.\n\n"]
Version créée le
25/07/2024 00:34